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Eloge de l'oisiveté de Bertrand Russel

23 Janvier 2008 , Rédigé par Jean-François Publié dans #Essais, documentaires

Je ne souhaite pas que ce blog devienne une tribune politique. Mais je ne suis pas imperméable à ce qui se passe autour de moi. Ma vie est imprégnée de mes rencontres et découvertes. La politique me passionne (attention pas celle qui s'affiche à la télé et sur de nombreux journaux), la vraie, la science des affaires de la cité comme son origine étymologique en témoigne.
Connaître nos origines (celles de l'homme, de la vie), comprendre comment nous vivons, ce que sont les sociétés organisées, ce qu'elles deviennent, comment elles entretiennent des relations, tout cela est fondamentalement passionnant.
Ainsi, les discours de nos hommes et femmes politiques (y compris ceux qui s'affichent partout en ce moment et qui ont tendance à s'emmêler les pinceaux en confondant les sphères publiques et privées), ces disours donc résonnent en moi et m'interpellent.
Mes lectures, mes choix de sorties, s'en trouvent souvent orientées, ou, si elles ne le sont pas, provoquent parfois des réactions.
Vous avez lu récemment dans la rubrique "Humeurs" mon opinion sur le slogan sarkozyen "travaillez plus pour gagner plus". J'avais alors tenté d'illustrer mon propos avec des ouvrages de la littérature enfantine et ce cher homonyme Jean-François, du Blog à Jef nous proposait aussi dans ce billet écrit à quatre mains deux livres et un film.
J'ai lu celui qui me manquait et voilà qu'il tombe à point nommé, à l'instant même où les menaces les plus sérieuses pèsent sur une des évolutions les plus importantes de ces dernières decennies : la réduction de temps de travail. Il faut dire qu'il avait fallut attendre plus de deux générations pour que à nouveau il y ait une réduction significative. En 1936, le Front Populaire diminuait de huit heures la semaine de travail en passant à 40 heures et enfin à l'aube du XXI° siècle nous gagnions encore 4 heures d'oisiveté grâce aux lois Aubry (Mitterand nous avait royalement accordé une heure lors de son intronisation) en arrivant à 35 heures. Pour plus détails se reporter à cet article historique sur Wikipédia.

Mais cela est-il à peine tout juste suffisant que nous voilà replongés 70 ans en arrière. Et en plus on voudrait nous faire croire que les "35 heures" étaient une loi rétrograde, passéiste, une formidable erreur dans le concert des Nations. Regardez donc nos voisins ? Ils travaillent eux ! Ben oui ! Mais on dira ce qu'on voudra, j'aime bien être différent surtout quand ma qualité de vie s'en trouve améliorée.
Mais voilà, il faudrait que les mentalités évoluent. Et notamment sur la question de la notion de "Travail". Il est crucial de bien définir ce concept. Je vous propose donc de lire (ou relire) en ces temps obscurs Bertrand Russell et son éloge de l'oisiveté.

Je n'en dirais pas plus sur le livre et vous donne juste quelques extraits... Ah ! si, tout de même, il a été écrit en 1932, et publié simultanément à Londres et à New-York.
Certain pourtant que les inspirateurs des lois du Front Populaire (RTT, Congés payés...) ont dû l'avoir sur leur table de chevêt. Il faudrait l'offir à tous ceux qui pensent que le travail libère l'homme...

"En effet, j'en suis venu à penser que l'on travaille beaucoup trop de par le monde, que de voir dans le travail une vertu cause un tort immense, et qu'il importe à présent de faire valoir dans les pays industrialisés un point de vue qui diffère radicalement des préceptes traditionnels."

"... la voie du bonheur et de la prospérité passe par une diminution méthodique du travail."

"Il existe deux types de travail : le premier consiste à déplacer une certaine quantité de matière... le second, à dire à quelqu'un d'autre de le faire. Le premier type de travail est désagréable et mal payé ; le second est agréable et très bien payé."


"La morale du travail est une morale d'esclave, et le monde moderne n'a nul besoin de l'esclavage."

Bonne lecture...

Eloge de l'oisiveté
de Bertrand Russell, éditions Allia, Petite collection, Paris - 6,10 €.
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C
De ci de là je vois refleurir des références contre la "valeur" du travail. Ici une évocation de l'an O1, là une éloge de l'oisiveté. Comme si les uns et les autres s'efforçait d'allumer un contrefeux idéologique contre le rouleau compresseur de la propagande présidentielle et gouvernementale.La tâche est diffcile tant elle bénéficie de tous les relais médiatiques possibles.Chaque fois que dans les conversations j'entends cette idôlatrie du travail je réinjecte l'idée d'utilité sociale pour inviter mes interlocuteurs à s'interroger sur le pourquoi et le comment ils travaillent.Travaillons tous moins et autrement n'est pas qu'un slogan c'est un condensé d'une autre approche de cet incontournable qu'est le travail.Les heures passées à entretenir nos logements, à oeuvrer dans des associations sont aussi du travail mais il n'est pas rémunéré.; C'est le salariat plus que le travail qui est à combattre.
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J
Oui, placer des coins partout pour démonter ce discours et cette idéologie rétrograde est plus que nécessaire. Cependant, je persiste à croire que c'est bien le travail qui est à combattre, le salariat n'étant qu'une de ses formes modernes (une façon à peine déguisée de rendre acceptable l'esclavage, encore plus pernicieuse lorsqu'il est assortie d'un CDI). Ce faisant, l'entretien de nos logements n'est pas un travail, une obligation, une nécessité tout au mieux (une corvée lorsque ça devient obsessionnel, voire un luxe... ). Est-il vraiment utile d'entretenir son chez soi ? Ni plus, ni moins que de manger, boire, se laver, dormir, finalement, c'est nécessaire, il n'y a donc pas de travail.Quant à l'engagement associatif, cela ne rélève pas du travail, mais de la vie citoyenne, de l'engagement social... ce que devrait être la vie libérée du travail... Oui, mais la production de biens de consommations ? (c'est mon petit diable qui me parle sur mon épaule...) Peut-être faudrait-il en faire des activités sociales, libérées de l'emprise économique, suis-je en train de lui répondre...  bonne nuit !!!
P
Bonsoir, Hermann Hesse a également écrit un très beau livre sur le même thème. je vais essayer de denicher celui du blog. Oui pourquoi courons-nous. Chaque jours je me pose la question.
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J
L'oisif, ce gourmet de la vie...
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D
Si je le trouve, je le lirai! J'aime bien aussi éloge de la lenteur et éloge de la paresse...
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F
Cette chronique est d'actualité. J'avais parcouru, il y a quelques temps, vos articles respectifs (Jef et Jeff) sur le fameux slogan dont je préfère oublier les mots (ça m'énerve, ça m'énerve !!!) et les avaient beaucoup apprécié. Cet "Eloge de l'oisiveté" me calmera peut-être ? J'en note les références.
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J
mais surtout prends ton temps...
G
On dit toujours qu'il est très important de laisser les enfants avec des "temps morts", des moments ou ils peuvent prendre leur temps et connaître l'ennui... mais une fois adulte, nous n'avons plus ce temps, et pourtant il est aussi important...
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J
et je t'avoue que parfois je les envie nos enfants, et comme ma fille je pense que j'aurais mieux fait de rester un bébé...Si ce n'est pas injuste ou improbable ça, tout de même... que nous ne puissions plus avoir le temps ? Comme si nous étions pressés d'arriver au plus vite au terminus, d'en finir avec la vie... peut-être bien qu'elle est là, la raison de notre impatience et de cette boulimie...et pourtant quand on regarde l'histoire, les grands hommes (penseurs, artistes, scientifiques même) eux en avaient du temps pour méditer, penser, créer... où est-il ce temps aujourd'hui ? Est-il si dangereux de penser et créer ?
P
J'ai pris un grand plaisir à lire cette note.
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J
merci...