"Travailler plus pour gagner plus" ou "Travailler moins et vivre mieux"
A quatre mains cet article a été écrit. Depuis quelques temps
sur le Blog à Jef de
nombreux sujets de société sont débattus et discutés. Celui-ci me chatouillait les narines, je voulais qu'il passe à la moulinette de ce blog corrosif et intelligent. Voilà, c'est fait. Un petit
raté de planning a fait que le sien a paru plus tôt, ma paresse probablement, mais que je revendique haut et fort !
Ces quelques mots nous trottent dans la tête depuis pas mal de temps : les médias et certaines de nos élites politiques nous martèlent cette petite phrase devenue un véritable dicton. Notre chef de l’Etat en a fait sa phrase de chevet, elle est devenu son cheval de bataille. Tant et si bien qu’il a souhaité l’appliquer à sa fonction présidentielle : travaillant autant, sinon plus que son Premier ministre, il lui a paru tout à fait normal de gagner autant que lui. Ce n’est pas sur cette dernière rémunération que nous souhaitons vous entretenir, mais plutôt sur les quelques mots qui ont provoqué cette soudaine augmentation salariale de 140 % (Ah ! le jour béni où les fonctionnaires, commençons par eux, auront une augmentation annuelle de, allez soyons modestes, 100 %...).
Cette phrase, donc, : « travaillez plus pour gagner plus » cache une idéologie (pour quelqu'un qui s'en défend, ce n'est pas bien !). Le concept qui prétend que le travail et l'argent sont intrinsèquement liés. Allons même plus loin : que l'argent est l'ultime finalité du travail. Exit, donc, son aspect social : participer par le travail à une société humaine ; sa dimension psychologique : le travail devient un outil de réalisation personnelle. Le travail n’est plus pensé comme une activité de la vie parmi d’autres : l’engagement associatif, militant, cultuel, les activités familiales, de loisirs, festives, les temps d’apprentissages, d’études, de formations mais aussi (et surtout) le droit de ne rien faire. Le travail devrait être un des agréments de la vie, vécu comme un plaisir et non une corvée, avec comme corollaire une consommation modérée et sans contraintes.
L'idée qui se cache maladroitement sous ce concept, sonnant comme un slogan publicitaire fallacieux, est celle du primat de l'argent sur le travail, de l'immatérialité sur l'action, de la valeur sur l'objet. Et pourtant, l'argent est-il plus important que le travail ? Peut-on travailler sans être rémunéré ? Peut-on gagner de l'argent, recevoir une rémunération sans fournir un travail en contrepartie ? Ces idées, sont-elles devenues si obsolètes, si incongrues que plus personne n'ose discourir sur ce sujet ? Alors qu’il était au cœur des discours politiques, il y a si peu de temps…
"Pour qu'il parvienne à la conscience de sa
force, il faut que le prolétariat foule aux pieds les préjugés de la morale chrétienne, économique, libre penseuse ; il faut qu'il retourne à ses instincts naturels, qu'il proclame les Droits de
la Paresse, mille et mille fois plus sacrés que les phtisiques Droits de l'Homme concoctés par les avocats métaphysiques de la révolution bourgeoise ; qu'il se contraigne à ne travailler que
trois heures par jour, à fainéanter et bombancer le reste de la journée et de la nuit". C'est là un extrait du "Droit à la
paresse" de Jules Lafargue, par ailleurs gendre de Karl Marx,
paru en 1880 (dont on trouvera un résumé
là).
S'ensuivit "L'éloge de l'oisiveté" de Bertrand Russel publié dès avant-guerre: "Les méthodes de production modernes nous ont donné la possibilité de permettre à tous de vivre dans l'aisance et la sécurité. Nous avons choisi à la place, le surmenage
pour les uns et la misère pour les autres : en cela, nous nous sommes montrés bien bêtes, mais il n'y a pas de raison pour persévérer dans notre bêtise indéfiniment”.
Plus près de nous, je crois que c'était dans les années 60, nous avions beaucoup apprécié le film "Alexandre le bienheureux", avec le regretté Philippe Noiret et la piquante Marlène Jobert. Dans ce film d’Yves Robert, Alexandre, lassé des tâches quotidiennes se met au lit, se bornant à déboucher quelques bonnes bouteilles, et déstabilisant peu à peu les certitudes de son voisinage.
Enfin et parce qu’il s’agit d’inculquer très tôt les bonnes valeurs, nous ne saurions mieux vous conseiller la lecture de "Rien faire" de Magali Bonniol
. Un album, accessible dès le plus jeune âge, sur les tribulations
paresseuses d’une petite fille et de son ourson en peluche. Pour enchaîner ensuite par "Monsieur crocodile a beaucoup faim" de Joan Sfar
, où les tribulations d’un crocodile affamé et d’une petite fille vivant chez sa tante (ses parents dorment sous
les verrous), magnifique fable sur la stupidité des modèles économiques actuels, qui de plus bat en brèche toute forme de morale bien pensante. (À croire finalement que nos penseurs d’aujourd’hui
ne sont pas où nous devrions les attendre, ils investissent pour l’avenir).
Et si finalement le sens de la vie se situait quelque part de ce côté, travaillant juste le nécessaire pour répondre aux vraies valeurs et assouvir les vrais besoins, loin des stress qu'accompagne la norme publicitaire à consommer toujours davantage, à nous soumettre aux angoisses du crédit, à vouloir "avoir l'air" et en oubliant la chanson, à avoir plutôt qu'être ? L'absurdité existentielle du slogan sarkozien débouche sur les maladies professionnelles et celles que créée le stress, les suicides au travail, la concurrence entre travailleurs au plus grand bénéfice des rentiers qui eux mènent grand train. Ces trains-là ne nous intéressent pas, nous préfèrons maintenant de beaucoup les tortillards d'une vie conviviale, un intérieur simplement composé d'une table et de chaises pourvu qu'elles soient bien garnies (la table et les chaises). Que faut-il pour ça ? À la fois s'interroger sur ses besoins réels et réorganiser le monde.
Qui osera dire : « "Travaillez moins, vivre mieux" ? c'est ce que je veux !!! ». On commence quand ?
« Travaillez plus pour gagner plus »
Ces quelques mots nous trottent dans la tête depuis pas mal de temps : les médias et certaines de nos élites politiques nous martèlent cette petite phrase devenue un véritable dicton. Notre chef de l’Etat en a fait sa phrase de chevet, elle est devenu son cheval de bataille. Tant et si bien qu’il a souhaité l’appliquer à sa fonction présidentielle : travaillant autant, sinon plus que son Premier ministre, il lui a paru tout à fait normal de gagner autant que lui. Ce n’est pas sur cette dernière rémunération que nous souhaitons vous entretenir, mais plutôt sur les quelques mots qui ont provoqué cette soudaine augmentation salariale de 140 % (Ah ! le jour béni où les fonctionnaires, commençons par eux, auront une augmentation annuelle de, allez soyons modestes, 100 %...).
Cette phrase, donc, : « travaillez plus pour gagner plus » cache une idéologie (pour quelqu'un qui s'en défend, ce n'est pas bien !). Le concept qui prétend que le travail et l'argent sont intrinsèquement liés. Allons même plus loin : que l'argent est l'ultime finalité du travail. Exit, donc, son aspect social : participer par le travail à une société humaine ; sa dimension psychologique : le travail devient un outil de réalisation personnelle. Le travail n’est plus pensé comme une activité de la vie parmi d’autres : l’engagement associatif, militant, cultuel, les activités familiales, de loisirs, festives, les temps d’apprentissages, d’études, de formations mais aussi (et surtout) le droit de ne rien faire. Le travail devrait être un des agréments de la vie, vécu comme un plaisir et non une corvée, avec comme corollaire une consommation modérée et sans contraintes.
L'idée qui se cache maladroitement sous ce concept, sonnant comme un slogan publicitaire fallacieux, est celle du primat de l'argent sur le travail, de l'immatérialité sur l'action, de la valeur sur l'objet. Et pourtant, l'argent est-il plus important que le travail ? Peut-on travailler sans être rémunéré ? Peut-on gagner de l'argent, recevoir une rémunération sans fournir un travail en contrepartie ? Ces idées, sont-elles devenues si obsolètes, si incongrues que plus personne n'ose discourir sur ce sujet ? Alors qu’il était au cœur des discours politiques, il y a si peu de temps…


Plus près de nous, je crois que c'était dans les années 60, nous avions beaucoup apprécié le film "Alexandre le bienheureux", avec le regretté Philippe Noiret et la piquante Marlène Jobert. Dans ce film d’Yves Robert, Alexandre, lassé des tâches quotidiennes se met au lit, se bornant à déboucher quelques bonnes bouteilles, et déstabilisant peu à peu les certitudes de son voisinage.

Enfin et parce qu’il s’agit d’inculquer très tôt les bonnes valeurs, nous ne saurions mieux vous conseiller la lecture de "Rien faire" de Magali Bonniol


Et si finalement le sens de la vie se situait quelque part de ce côté, travaillant juste le nécessaire pour répondre aux vraies valeurs et assouvir les vrais besoins, loin des stress qu'accompagne la norme publicitaire à consommer toujours davantage, à nous soumettre aux angoisses du crédit, à vouloir "avoir l'air" et en oubliant la chanson, à avoir plutôt qu'être ? L'absurdité existentielle du slogan sarkozien débouche sur les maladies professionnelles et celles que créée le stress, les suicides au travail, la concurrence entre travailleurs au plus grand bénéfice des rentiers qui eux mènent grand train. Ces trains-là ne nous intéressent pas, nous préfèrons maintenant de beaucoup les tortillards d'une vie conviviale, un intérieur simplement composé d'une table et de chaises pourvu qu'elles soient bien garnies (la table et les chaises). Que faut-il pour ça ? À la fois s'interroger sur ses besoins réels et réorganiser le monde.
Qui osera dire : « "Travaillez moins, vivre mieux" ? c'est ce que je veux !!! ». On commence quand ?
Co-écrit pet Jef et Jeff
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Tags: travail, argent, Sarkozy, économie, philosophie, utopie, Lafargue, Marx, paresse
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